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marie le franc

veux courts, un petit mouvement sec de la nuque pour redresser la tête, comme sur un mannequin, et les girls sont prêtes. Personne n’a de chapeau malgré le soleil qui fond l’asphalte. Les chapeaux sont restés à Omaha, Milwaukee, Vancouver, Charlottetown. On voit émerger au-dessus de la troupe claire un chapeau melon. Il fait bon dans la Galerie des Beaux-Arts. On s’assoit sur l’escalier de marbre, entre les palmiers stérilisés, sous les bras tendus des dieux en simple attirail. Le peintre fait en gesticulant un cours de mythologie. Il tend à bout de bras son chapeau melon et il semble qu’il y puise un langage extraordinaire fait d’argot de Montmartre, mêlé d’italien et de russe. Il devient lyrique : on croit qu’il va pleurer à propos de la Vénus mutilée. Personne ne comprend, mais tout le monde a envie de rire. On se cache comme on peut à l’ombre des statues. On dirait que Vénus glousse. Les monitrices françaises pouffent. Elles sont jolies, elles ont dix-huit ans, connaissent mal la grammaire, mais les étudiants ne les lâchent pas et elles contribuent au succès du cours d’été. Quand il y a au programme de la soirée le jeu de la conversation et qu’il s’agit au premier son de cloche de choisir une partenaire pour débattre avec vous, en cinq minutes de promenade sous les arcades, un problème de ce genre posé au tableau noir : « Est-il possible pour un homme marié de continuer à ai-