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néral. Elle en vient à l’objet de sa visite, tire de son sac un paquet de cartes postales, représentant les œuvres de son peintre abondamment médaillées, et le présente sous de telles couleurs que le professeur prête une oreille intéressée. Il sait que les valeurs pittoresques sont plus importantes pour les cours d’été que les diplômes d’agrégé. Il se défie un peu du Russe pour une histoire de l’art, mais il l’engage pour les promenades artistiques. Jeannine rayonne : une promenade par jour à dix dollars et le lunch par-dessus le marché, voilà ce qu’elle a gagné à aller aujourd’hui dans le monde.

À l’heure du lunch, le peintre monte le perron monumental du Prince of Wales. Il a sur lui sa garde-robe restante : chapeau melon, redingote, manchettes empesées, pantalon à raies, une perruque. Et le Fahrenheit à 90° ! Le gong vient de sonner. Il y a sous les arcades deux cents étudiantes en robes claires, cinquante étudiants en veston léger, quand paraît le représentant de la sombre Russie. Le professeur de B. est consterné : son rapin n’est même pas drôle, mais gros, rouge et solennel. Et affamé ! De sa place, il le voit allonger à travers la table un bras au bout duquel vacille une manchette. Après le lunch, on affiche dans le hall l’annonce de la visite artistique. Un coup du peigne de poche dans les che-