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La découverte soudaine de la vérité devait être terrible. Un soir, elle fut prise, en sa présence, d’une quinte de toux violente qui se termina par une hémoptysie. Elle cracha une cuvette de sang, et quand, la crise passée, elle retomba sur sa chaise-longue, où il la soutenait, il lut sur sa figure exsangue, dans ses yeux agrandis, qu’elle était condamnée.

Le docteur, que la tante affolée avait mandé en toute hâte, prodigua les banales consolations habituelles : Aline était jeune, on avait vu des cas plus graves ; avec le beau temps, les forces reviendraient… Mais le jeune homme n’avait plus d’espoir.

Cependant, l’hiver approchait de sa fin ; les dernières neiges fondues, la Montreal Street Railway Co. reprit l’exploitation de tout son réseau et Wilfrid, dont le nom figurait sur la liste des employés de l’été précédent, fut remis, à sa demande, sur la ligne de Cartierville.

La veille du jour où il recommença son service, il annonça la nouvelle à la petite malade, dont il tenait les mains amaigries entre les siennes, et ajouta qu’il ferait le même trajet que l’an passé.

— « Vous rappelez-vous, chérie, de l’endroit où vous attendiez le tramway, chaque matin ? Il y avait un vieil orme au coin du chemin et je lui en voulais beaucoup, à ce vieil orme, car, quelquefois, il vous cachait toute entière. Dépêchez-vous de guérir pour me faire la surprise un beau matin de vous trouver au même carrefour, comme autrefois.