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GRAND-LOUIS L’INNOCENT

et des petites fenêtres, le rideau de l’alcôve, le miroir verdi, la bibliothèque luisante.

Il s’arrêta devant la cheminée où le feu de chêne brûlait, en dégageant une odeur de clairière d’automne. Ses fortes épaules frissonnèrent sous la toile de la vareuse. Il parut se rappeler qu’il avait froid. Il jeta un regard craintif vers le seuil. Il n’y vit personne, sans doute, tendit ses mains à la flamme d’un air d’intense contentement. La porte ouverte sur la pièce voisine attira son attention. Il la regarda un long moment, puis se dirigea vers elle, de son grand pas d’automate.

Il entra dans l’arrière-salle. La table n’était pas encore desservie. Une odeur de café flottait dans l’air.

Ève, étonnée de son immobilité, s’appro­cha.

Il était debout devant les mets restants, les mains toujours croisées sur sa poitrine, crispées sur son béret de marin. Un air de souffrance, de perplexité et de convoitise creusait sa face.

Elle poussa devant lui le pain et les fruits. Ses mains se portèrent dessus. Pendant qu’il mangeait, elle regardait la nuque puissante inclinée, le cou dégagé dans la vareuse, brûlé de soleil et d’eau de mer. Les pauvres