élégiaque sur les petits morceaux de parent que je venais
de ramasser. Il n’était pas encore assez mort : je voulais me venger de son indigente sépulture, et, pour punir sa mémoire, assassiner sa cendre. J’avais déjà écrit de ce sauvage Épicédion trois ou quatre stances meurtrières qui me semblaient fort belles, quand, regardant
pour m’inspirer mes tristes et risibles conquêtes, ma pensée affamée tomba comme un vautour sur ce vase de froment, que j’avais d’abord assez peu prisé. Une foule d’idées agricoles s’empara de mon cerveau : j’oubliai ma vengeance ; mon poème interrompu ne fut
point achevé, et les mânes de Faber échappèrent au supplice que je leur préparais.
Le lendemain même de ma trouvaille, je disposai
bien soigneusement un petit coin de mes meilleures
terres, où je n’avais rien planté depuis deux ans, et que
j’avais néanmoins nourri des engrais les plus féconds.
Il aurait dû y pousser des diamants, que je ne l’aurais
pas préparé avec plus de zèle et d’attention. Le temps
venu, j’y semai grain par grain mon froment tumulaire,
en invoquant Cérès la blonde déesse, et Cybèle la mère
des pasteurs. Cette dernière cérémonie n’était pas indispensable ;
mais j’aurais cru manquer, en y renonçant,
à tous les devoirs de ma profession. Il n’en eût sans
doute été ni plus ni moins de ma moisson, mais je l’aurais
moins espérée. Et vous le savez tous aussi bien que
moi : quand la vie n’est pas qu’un regret, elle n’est
qu’une espérance.
Mes fonctions de laboureur ne m’empêchent pas d′être