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pagnard, qui chérit les bois et les fleurs, qui sait mieux ébourgeonner sa vigne que ses écrits, et qui dit au soleil : Échauffe, si tu peux, mes vers ; mais mûris d’abord mes raisins.

Ah ! Madame, quel malheur que je harangue ainsi le soleil ! Il est évident qu’un homme qui tient de pareils discours ne fera jamais un portrait ressemblant de l’abbaye du Val, ne pourra jamais vous initier aux émotions mystérieuses qui nichent, comme des oiseaux de nuit, aux crevasses de ses combles. Je ne veux cependant pas renoncer à vous les faire connaître : ce que je rêve, d’autres l’exécutent. Vous pourrez consulter là-dessus un album, que j’ai peut-être commencé pour moi, mais que je finis pour vous. J’ai rassemblé dans un volume ce qu’ont inspiré de plus poétique aux écrivains les plus célèbres ou les plus inconnus, les ruines des monuments religieux. L’Angleterre en a fait presque tous les frais, et nos compatriotes ne sont pas nombreux ; mais j’ai quelques amis capables de compléter la liste, et j’appellerai leur richesse au secours de notre indigence. Vous y verrez, en attendant, des pages de Nodier et de Chateaubriand à côté d’une peinture de Scott et de Byron, quelques lignes de Mme de Staël sous une esquisse de Bœrn ou un paysage d’Anne Radcliffe, quelques vers de Fontanes près d’une vue de Leiston abbey par le quaker Barton. J’ai traduit pour vous l’élégie du Cloître du poète allemand Matthisson, et je vous laisse traduire le poème de Wilson sur l’abbaye de Furness. C’est un bien bel écrin que je vous destine ; mais souffrez que je