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De retour à son logis, il ouvrit un champ vaste à ses réflexions, dont le résultat fut pour lui d’abandonner la capitale, où il se verrait toujours exposé à voir sans profit des beautés complaisantes qu’il ne pouvait plus contenter, des jeunes gens ivres de plaisir insulter par leurs jouissances multipliées à la honte de son impuissance, des abus qu’en politiquant il n’avait pu réformer, une jeunesse oisive et débauchée et une vieillesse triste et méprisée.

Belleval abandonna donc dès le lendemain ce fracas incompréhensible, cette tourbe de désordres, cette habitation du vice, où l’innocence la plus épurée se corrompt seulement en respirant son air contagieux, et se confina dans une retraite à l’acquisition de laquelle il employa le reste de son revenu échappé du gouffre infernal du jeu et converti en fonds réels.

Tout en cultivant quoiqu’à soixante et quelques années un joli jardin dépendant de l’asile champêtre qu’il s’était choisi, la mémoire de Constance, de cette Constance qu’il avait idolâtrée, lui revenait à l’imagination ; il se reprochait intérieurement d’être la première cause des dérèglements de cette fille infortunée, morte si miséra-