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courant. C’est, en effet, à une constatation banale que Lamarck s’est adressé ; il a emprunté à la sagesse des nations cet aphorisme : « les habitudes forment une seconde nature », et, s’il en a tiré un si grand profit dans l’explication de la formation des espèces, c’est que cet aphorisme résume précisément l’observation la plus générale qui puisse se faire sur les êtres vivants.

Étant donnée la variabilité incessante des conditions réalisées autour d’un être vivant quelconque, variabilité qui provient de ce que le jour succède à la nuit, le chaud au froid, etc., on peut dire sans exagération que vivre, c’est s’habituer sans cesse à quelque chose de nouveau. Quand les conditions sont par trop nouvelles, il arrive souvent que l’individu meurt ; alors, il n’intéresse plus le biologiste ; s’il ne meurt pas, c’est qu’il s’habitue ; il n’y a pas d’autre alternative. Tout individu qui vit aujourd’hui n’a cessé de s’habituer depuis le jour de sa naissance ; s’il a été atteint d’une maladie et s’il s’en est guéri, il s’est habitué à cette maladie, etc.

Or, qu’est-ce que s’habituer ? C’est sûrement changer. Un individu habitué à un facteur d’action est différent de ce qu’il était avant de s’y être habitué. Et, par conséquent, ici encore, le langage individualiste se trouve pris en défaut. Ce langage ne tient compte que des similitudes (elles sont, en effet, plus apparentes) ; il néglige les différences