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trop indigente, trop rudimentaire, physiologiquement. Enfin, si nous exposons en pleine lumière les réserves, les précautions indispensables que l’hygiène et la thérapeutique prescrivent en cette matière, c’est pour que le grand public féminin saisisse plus vivement combien la conception, l’application du corset de toilette restent choses difficiles, délicates, scientifiques même. D’ailleurs, nous verrons que la réaction en faveur du corset rationnel — dont l’usage a été formellement interdit par certaines universités à leurs élèves — se manifeste un peu partout aujourd’hui. Notre protestation personnelle, déjà ancienne, a eu quelque écho. L’opinion que nous avons recueillie chez nombre d’hygiénistes et de praticiens français s’est répercutée jusqu’en Allemagne, où une célébrité médicale, le Dr Moeller, déclare : « Que l’abolition du corset est chose absurde et anti-hygiénique, parce que le corset bien compris peut avoir un rôle important, qui est de soutenir les épaules et la poitrine, tout en assurant aux poumons un jeu plus libre ».

Bien qu’insuffisante, cette définition était bonne à recueillir ; elle contient implicitement une partie de ce que nous établirons par la suite. En fait, le problème présentait trois difficultés principales, dominantes, à résoudre : 1° maintenir à leur niveau fonctionnel, dans leur situation normale et sans constriction, tous les organes abdominaux ; 2° soutenir symétriquement le rachis, le squelette thoracique, les seins, tout en libérant les poumons ; 3° enfin, assurer ou restituer à la stature féminine l’aisance des flexions, la grâce, la distinction d’allure que la femme moderne s’efforce d’atteindre sans toujours y réussir. Or, à ce point de vue particulier, l’opinion du regretté Dr Proust, de l’Académie de Médecine, mérite d’être citée textuellement. L’avis de cet éminent praticien a une saveur toute particulière, un caractère éducateur dont nous ne voulons point priver nos lectrices :

« Toute compression excessive, dit cet auteur, en gênant la circulation capillaire, produit, sur toutes les parties du corps où elle s’exerce, des congestions dangereuses et des déformations souvent incurables. Il ne faut pas que le corset porte jusqu’à l’exagération la finesse de la taille. Il y a une perversion de goût et, disons-le, un coupable attentat contre soi-même dans cette