Page:Le Corset de Toilette.djvu/21

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— 20 —

produisant des hanches postiches, carrées, énormes, sur lesquelles il lui reste la liberté de reposer ses bras raidis dans ses manches à crevés. Elle a l’air de sortir d’un tambour ou, si vous préférez, avec sa tête émergeant d’une collerette aussi vaste qu’évasée, elle offre assez bien l’aspect d’un oranger en caisse. » Nous n’aurons point la cruauté d’insister sur cette peinture. C’est sous Marie de Médicis que les robes étroites de la ceinture, appliquées sur les corsets de fer, commencèrent à bouffer autour des hanches par de gros bourrelets qui s’augmentèrent encore sous le nom de « vertugadins », corruption du mot vertu-gardien, nous dit P. Lacroix[1].

Cependant les dames s’ingénient à orner leur corset.

L’armature est recouverte de velours, de damas. Le buse, laissé apparent, est en fer damasquiné en ivoire, en écaille gravée. Les arabesques s’y enchevêtrent avec les devises gracieuses ou galantes[2].

Au martyrologe du corset de cette époque, il faut inscrire le nom de la duchesse de Mercœur, étouffée par son « corps de baleine ». Le procès-verbal de décès rédigé en vers, disait ceci :

« Les côtes du thorax au dedans retirées
« Retenaient les poumons un petit trop serrés ».

Ces corsets firent fureur cependant. Les hommes eux-mêmes les employèrent. Ces derniers y ajoutèrent en outre un plastron rebondi, « estoffé « comme un bât de mulet à coffre ». Il avait la forme d’une bosse allongée, semblable à celle du Polichinelle et portait le nom de « panseron ». Cette mode extravagante fut adoptée avec un tel entraînement, un tel snobisme, dirions-nous aujourd’hui, que l’usage dut en être réglementé, en Italie, par une loi somptuaire.

Sous les Valois-Médicis, les costumes de cour et des gens de qualité constituent les types saillants des modes et des corsets importés d’Italie. La

  1. Ce monstrueux appareil de baleine et d’acier venait d’Espagne. Il se transforma plus tard en ces grands paniers à tournure, portés jusqu’à la fin du XVIIIe siècle ; ils ont tenté de reparaître il y a cinquante ans sous le nom de crinoline. Pour se faire une idée de l’immensité de cette tournure, il faut voir au Louvre le portrait en pied de l’Infante Marie-Thérèse.
  2. On possède encore, dit-on, le buse d’Anne d’Autriche, qui porte ces mots gravés : « Je repose sur le cœur de ma maîtresse ».