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route des Riparias qui s’ouvrait. Il ne faut pas s’étonner de la ténacité avec laquelle les vieux vignerons se cramponnaient à la facilité de la vigne qui valut à Noé ce moment d’oubli que tous lui pardonnent, mais qu’aucun n’oublie, tant les générations se passent religieusement la joyeuseté du père et la faute du fils. Des quatre modes de défense ou reconstitution, deux sont locaux, exclusivement restreints à certains milieux. Ce sont : 1o les plantations dans les sables ; 2o la submersion. Les insecticides ne sont qu’un palliatif exceptionnellement suffisant. La vigne américaine est le seul moyen qui permette et promette de rentrer dans la vieille viticulture, celle de Noé dont nous parlions tout à l’heure, et encore ! à la condition de ne faire que des produits directs. Mais tous ces moyens sont subordonnés au milieu, et tous, sur ce chapitre, sont d’une délicatesse incomparablement plus grande que la vieille vigne lentement adoptée par les siècles.

Pour les sables, c’est la présence ou l’absence du sel et de l’eau douce qui domine la question, puis ce sable doit être pur, absolument siliceux et très mobile.

La submersion demande naturellement que l’eau soit assez abondante pour pouvoir maintenir pendant quarante jours, 40 centimètres d’eau au-dessus du sol, mais il ne s’agit pas de le faire en amenant une trop grande quantité, car si elle excédait 15 ou 18 000 mètres cubes à l’hectare, elle apporterait une quantité d’air telle, qu’il s’accumulerait autour des racines, les revêtirait d’une quantité de globules leur donnant cette apparence argentée qui prédit l’insuccès. Ces globules fournissent au phylloxéra l’air nécessaire pour échapper à l’asphyxie cherchée et pour laquelle il faut la pression de 40 centimètres de hauteur d’eau. La question de l’écoulement est fort importante, nous avons vu, à propos de sa quantité, le degré d’imperméabilité que le terrain doit posséder pour la conserver le temps nécessaire. Mais là gît la difficulté contraire, quand il s’agit d’écoulement, car il faut que cette eau puisse s’en aller très facilement, tant pour ressécher et assainir la terre que pour pouvoir faire les façons en leur temps. Il faut enfin que l’aération soit suffisante pour ne pas attirer les maladies cryptogamiques. Dans mes précédents écrits, je n’ai pas tenu un compte suffisant de cette circonstance, et en parlant de milieux humides je pensais à des endroits encaissés et étouffés comme Val-Marie, ou à des marécages. Le professeur Husmann nous l’a dit : « Partout où règnent les fièvres ou une forme quelconque de malaria, renoncez à cultiver la vigne. » Mais quand on voit l’admirable végétation des vignes des deltas du Rhône, le vignoble de M. le comte d’Espous, au bord de l’étang de