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de la vie de Mahomet.

en présence de ses parens : « Voilà mon frère, mon lieutenant et mon calife. Écoutez-le, et lui obéissez ». Toute l’assemblée éclatant de rire, tourna les yeux vers Abutaleb « C’est à toi désormais, s’écria-t-on, à recevoir les ordres de ton fils, et à lui prêter obéissance. »

Ce début peu favorable n’arrêta pas le nouvel apôtre. Inébranlable dans ses desseins, il marcha d’un pas ferme à leur exécution. Il continua d’exhorter ses parens et ses amis à embrasser l’islamisme. Il tonnait contre l’idolâtrie et la foudroyait de son éloquence victorieuse. Le peuple trembla pour ses dieux. Les grands craignirent pour leur puissance. La haine fut le fruit de son zèle. Toute sa famille l’abandonna. Ses disciples seuls lui restèrent fidèles.

Abutaleb soutenait en secret les intérêts d’un neveu qui lui était cher. Les chefs des Coreïshites vinrent le trouver. Otba, Abusofian, Abugehel et quelques autres choisis parmi les principaux de la tribu, lui parlèrent en ces termes. « Ô Abutaleb ! le fils de ton frère couvre nos dieux d’opprobre. Il accuse nos sages vieillards d’ignorance, et soutient que nos-pères ont vécu dans l’erreur. Arrête ses écarts. Réprime son orgueil de peur que la discorde ne vienne troubler la paix où nous vivons[1] ». Abutaleb parut touché de ces plaintes. Il parla avec douceur aux députés, et promit de mettre un frein à la violence de son neveu.

Ses représentations furent vaines. Mahomet n’en déclama qu’avec plus de force contre l’idolâtrie. Il démontra la vanité des idoles, et l’absurdité de leurs adorateurs. Ses discours étaient semés de traits de lumière qui portaient le jour à travers les ténèbres dont le peuple était environné. Les Coreïshites en furent alarmés. Ils craignirent de voir abolir un culte dont ils étaient les soutiens. L’autorité dont ils jouissaient à l’abri des autels, leur parut

  1. Abu-Feda, page 10.