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de la vie de Mahomet.

lui répondirent qu’ils avaient renversé les autels de leurs dieux, et que, soumis à la vraie religion, ils étaient prêts à combattre l’idolâtrie de toute leur puissance. Ces nouvelles le flattèrent. Il félicita les princes sur le bonheur qu’ils avaient eu d’ouvrir les yeux à la lumière, et les exhorta à la fidélité envers Dieu et son apôtre[1]. Pour s’assurer de ces riches contrées, il envoya deux lieutenans y commander en son nom. Abou mousa eut le gouvernement de Zabid et d’Aden. Moadh alla faire sa résidence à Jand. Intimement lié avec ce dernier, Mahomet lui donna des preuves de son amitié à son départ. Il lui ceignit la tête d’un turban ; il l’aida à monter sur sa mule, et le conduisit à pied un espace de chemin assez long[2]. Moadh, confus, voulait descendre. « Restez, mon ami, lui dit le prophète. Ne croyez pas que je manque à ma dignité ; j’accomplis l’ordre du ciel, et je satisfais mon cœur. Il faut que celui qui est revêtu du commandement soit honoré. Hélas ! ajouta-t-il en soupirant, si je pouvais espérer de vous revoir un jour, j’abrégerais les ordres que j’ai à vous donner ; mais c’est la dernière fois que je m’entretiens avec vous. Nous ne nous réunirons qu’au jour de la résurrection. » Les deux amis se quittèrent en versant des larmes. Ils ne se revirent plus.

La joie des nouvelles agréables qu’il avait reçues fut troublée par un événement douloureux[3]. Il n’avait qu’un fils âgé de dix-sept mois. C’était l’unique rejeton qui pût transmettre son nom à la postérité. La mort lui enleva cette flatteuse espérance. Le jeune Ibrahim mourut. Ce fut un jour de deuil pour Médine. La nature parut aux yeux du peuple, sensible à cette perte. Une éclipse de soleil, qui couvrit de ténèbres la face des cieux, fut attribuée à la

  1. Ebn Ishac.
  2. Jannab, page 273.
  3. Elbokar.