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mal d’yeux le forçait à demeurer oisif. Il parut le front ceint d’un bandeau[1]. Mahomet l’ayant fait approcher lui frotta les yeux de sa salive, et le mal se dissipa. Après cette cure merveilleuse[2], il lui donna l’étendard de la religion, et l’envoya contre les assiégés. Ali le reçut avec joie, et marcha avec confiance. Il monta sur la brèche et y planta son drapeau. Les Juifs sortirent en grand nombre pour le repousser ; mais Ali, inébranlable dans son poste, renversait tous ceux qui osaient se mesurer avec lui. Il avait étendu à ses pieds Elhareth. Marhab, lieutenant du château, descendit pour venger la mort de son frère. Cet officier était renommé pour sa force et son audace[3]. Couvert d’une double cuirasse, ceint de deux épées, il portait deux turbans avec un casque où l’on voyait briller une pierre précieuse de la grosseur d’un œuf. Sa main était armée d’une lance en forme de trident. Les Musulmans n’osaient se mesurer avec lui. Il marcha fièrement contre Ali, qui l’attendait de pied ferme, et lui dit en l’abordant : Tu connais Khaïbar. Je suis Marhab. Mes armes sont bonnes, et j’ai le bras d’un héros. Et moi, lui répondit Ali, je m’appelle le lion ; c’est le nom que ma mère me donna en naissant. Je vais te mesurer avec cette épée à la mesure de Sandara. (C’est une grande mesure.)

À ces mots les deux rivaux en vinrent aux mains. Ils se portèrent des coups terribles. Ali, plus adroit, trompait le bras de son pesant adversaire. Ayant saisi l’instant où Marhab avait porté à faux, il lui fendit la tête d’un coup de sabre. Son casque, ses turbans, ne purent le garantir. Marhab, sans vie, roula sur la poussière. Ali ne s’arrêta point à cet exploit. Il poursuivit les Juifs, consternés de la

  1. Abul-Feda, p. 89.
  2. Il est bien probable que cette cure merveilleuse, si célèbre parmi les auteurs mahométans, était concertée entre le beau-père et le gendre.
  3. Moallem el Tanzil.