Page:Le Coran - Traduction de Savary, volume 1, 1821.djvu/107

Cette page a été validée par deux contributeurs.
85
de la vie de Mahomet.

rendaient presque imprenable. Ce prince, le plus riche et le plus puissant de la nation, prenait le titre de roi des Juifs. Il s’y était renfermé avec ses trésors. Il fallut l’assiéger en forme. On fit approcher les beliers et les autres machines de guerre. On battit la muraille sans relâche, malgré les efforts des assiégés. Encouragés par l’exemple de leur chef, qui s’exposait aux plus grands périls, les Musulmans montrèrent une ardeur incroyable. On fit brèche. Il s’y livra plusieurs combats ; mais les assiégeans, malgré leur bravoure, ne purent gagner les derniers retranchemens. Mahomet voyant leurs efforts inutiles fit sonner la retraite. Pendant deux jours il resta enfermé dans sa tente, méditant sur les moyens de se rendre maître de la forteresse[1]. Tandis qu’il combinait son plan, Abubecr prit l’étendard de l’islamisme, et, suivi d’une troupe d’élite, alla le planter sur la brèche. Il y combattit vaillamment ; mais la résistance opiniâtre des assiégés l’obligea de se retirer. Omar crut qu’il serait plus heureux. Il saisit le même étendard, et, appelant ses braves compagnons, il les mena contre l’ennemi. Malgré une grêle de dards et de flèches, ils montèrent sur les débris de la muraille, et firent des prodiges de valeur ; mais, après un rude combat, ils furent forcés à prendre la fuite. Les deux officiers rendirent compte à leur général du peu de succès de leurs armes. « J’en jure par l’Éternel, leur dit Mahomet ; demain je confierai cet étendard aux mains d’un brave, ami de Dieu et de l’apôtre qu’il aime, guerrier intrépide qui ne sait point tourner le dos à l’ennemi. » Le lendemain, les Mohagériens et les Ansariens avaient de grand matin entouré sa tente. Le cou penché en avant, l’œil fixe, ils pressaient leurs rangs pour découvrir sur qui tomberait le choix glorieux. Chaque brave s’en faisait honneur. Depuis plusieurs jours l’invincible Ali gémissait de voir son courage inutile ; un

  1. Abul-Feda, p. 89.