ter une seule fois. Elle fit sa fortune, selon la prédiction du vieux tzigane, elle fut vraiment dans sa loge comme un talisman. Il est juste de dire qu’il était lui-même le plus rangé des hommes et le plus sobre, le plus habile, le plus laborieux des sabotiers. De simple, ouvrier il passa patron, put s’établir au bourg de Saint-Servais dans une maison de pierre couverte en ardoises, pratiquer sur un pied plus large le commerce de sabots et finalement, devenir un des principaux rentiers de l’endroit.
« Cependant les autres cousins ne laissaient pas d’être jaloux de la prospérité si rapide des affaires de François Harnay.
« Un d’eux surtout, un nommé Chevanz, homme violent et débordé, que la malchance, d’ailleurs, poursuivait, allait partout répétant que Harnay avait, par l’intermédiaire des Bohémiens, fait un pacte avec le diable, si même le grand vieux à longue barbe blanche, qui lui avait remis la hache mystérieuse, n’était pas le diable en personne. Au fond, ce Chevanz brûlait d’envie de s’approprier cette hache, fût-ce par la fraude et par le vol. Il y réussit, on ne sait comment, Harnay s’aperçut un beau jour que l’outil auquel il tenait tant lui avait été dérobé, et tout de suite il soupçonna quel était le voleur. Il eût pu s’adresser aux gendarmes. Mais il était de tradition parmi les cousins que l’on réglât ses comptes entre soi, en famille, comme on disait, Harnay se contenta de réunir chez lui, un dimanche soir, ceux de ses ouvriers sabotiers dont les habitudes d’ordre et d’honnêteté lui étaient particulièrement connues. Et il les harangua à peu près en ces termes :
« — Camarades, il s’est trouvé un cousin assez indélicat pour enlever ma bonne hache. Son nom, je n’ai pas