plation des étoiles qui les enchanta. Suis-nous Jean Rumengol !
Un soir, il les suivit.
La mère-nourrice lui fit de graves adieux. Elle lui passa au cou une médaille de plomb où se voyait en pied la Vierge de Rumengol, avec ses doigts fins qui se prolongeaient en rayons.
— C’est le portrait de ta marraine, dit-elle, quand on t’a trouvé près de son pilier, à l’église, elle te souriait ineffablement. Puisse son sourire t’accompagner et être dans toute ta vie comme une lumière ! »
Là-dessus, Jean Rumengol s’enfonça dans la nuit.
C’était le temps où la terre bretonne est en fleurs, où des odeurs de paradis lointains semblent se mêler à l’haleine des choses. Le jeune homme marcha devant lui, au hasard, du côté où soufflait le vent, tout étonné de sentir trembler dans son âme le reflet des étoiles qui brillaient là-haut.
Et dès lors il erra, semant à plein gosier les beaux vers, lâchant à travers l’Armorique les vols éperdus de strophes qui se nichaient d’elles-mêmes dans les mémoires. Il eut son heure de popularité. En Cornouailles, en Tréguêr, en Goëlo, on le salua comme le maître des chanteurs. On l’avait surnommé costik ann od, « le rossignol des grèves », parce qu’il voyageait de préférence le long des côtes et se faisait surtout entendre dans les hameaux marins. Non qu’il dédaignât l’intérieur, le pays de l’Argoat [1], où fument, sous le couvert des bois, les cabanes très primitives des sabotiers. Mais la mer l’attirait. Les vents lui avaient raconté sur elle des his-
- ↑ On appelle ainsi, plus particulièrement, toute la Cornouaille des monts d’Arrée dont les pentes sont encore couvertes de bois.