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de là-bas, avec leurs toits d’ardoises claires qui semblent dire au voyageur : « Arrête-toi. Qu’irais-tu chercher plus loin ? Le bonheur est ici ! »

Nous habitâmes tour à tour les postes de Bodic, de Port-Béni, de Lantouar. Tous, des phares terriens, situés sur les hauteurs verdoyantes ou à l’embouchure des rivières salées du Trégor. Il eût été difficile de rêver à notre félicité des nids plus charmants. Nous y vivions, Adèle et moi, côte à côte, jamais séparés. Les nuits même, lorsque j’étais de quart, elle les passait avec moi dans la lanterne. Ces veillées aériennes dans la grande lumière éclatante, lui étaient un prétexte à mille imaginations délicieuses ou folâtres. Élevée, toute petite, sur les genoux des conteuses trégorroises, adonnée plus tard, dans le désœuvrement de ses après-midi solitaires, aux lectures les plus romanesques, elle avait à un degré surprenant l’esprit fécond et la verve ingénieuse