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sommeil, s’entr’ouvraient comme le fascinant calice noir de quelque fleur empoisonnée.

Elles exhalaient vers moi, avec le parfum de son haleine, toute la capiteuse odeur de sa jeunesse mûrissante et de sa pleine beauté… Comment la tentation ne me fût-elle pas venue d’aspirer sur ces lèvres, tant adorées naguère, le philtre, d’autant plus savoureux peut-être qu’il était plus corrompu, de nos inoubliables ivresses d’antan ?

— Eh ! oui, prends-la donc ! me criaient mes sens affolés, prends-la furieusement, bestialement, comme une proie de plaisir, comme une fille ! Assouvis sur elle ton exécration et qu’elle défaille sous ton étreinte jusqu’à mourir !

Mourir… Ce mot suffit à me rendre à moi-même. Je songeai à la mort qui planait, en effet, sur elle, sans quelle s’en doutât. Et je m’étonnai soudain, à la pensée qu’elle ne soupçonnait rien, qu’elle ne devinait rien, et qu’elle se tenait là, pelotonnée contre