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de poissons séchés ; une paire de rames, toutes velues de mousse marine, était appuyée contre l’armoire ; un ancien coffre de matelot, privé de son couvercle, contenait une provision de pommes de terre. Les meubles sentaient la crasse, la moisissure, le délabrement. Du lit à deux étages où les enfants étaient couchés, des mèches de varech s’échappaient par les déchirures des paillasses. Je n’avais pas idée d’un pareil désordre, d’une pareille saleté ; il fallait vraiment qu’ils crevassent les yeux, pour que j’y fisse attention, en un tel moment. La Chevanton elle-même éprouva le besoin de s’en excuser :

— Avec une ribambellée de marmaille, vous savez, on n’arrive pas à tenir propre.

Comme je cherchais des yeux où m’asseoir, elle essuya le banc, près de la table, avec le revers de son tablier.

— Au surplus, reprit-elle, on dit chez nous, à l’île, que conscience nette vaut mieux que mobilier luisant.