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votre permission ; mais, il y a près d’un an que ce scandale dure : il n’est que temps que vous le sachiez, avant que la rumeur s’en répande. J’ai hésité jusqu’à ce jour à vous avertir. D’ailleurs, toutes les fois que je vous cherchais, vous vous détourniez de moi. En fin de compte, hier, j’ai consulté saint Konogan : j’ai posé une coque d’œuf sur l’eau de sa fontaine ; la coque a vogué droit à la statue du saint : c’était signe qu’il fallait, coûte que coûte, que je parle. Ma conscience sera désormais en repos : j’ai parlé.

Je m’étais croisé les bras, et je la regardais d’un œil hébété, sans comprendre. Ma femme, le diable, saint Konogan, la coque d’œuf, tout cela sautait, zigzaguait, s’enchevêtrait dans mon entendement, comme ces petits points lumineux qui vous dansent dans les prunelles, lorsqu’on passe du plein jour à une complète obscurité. Puis, brusquement, comme dans la déchirure tragique d’un coup de foudre, je vis clair.