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d’échanges épistolaires, nous restions en communication, de temps à autre, par l’intermédiaire des maraîchers roscovites qui parcourent, chaque saison, toute la Bretagne. Parmi ceux qui fréquentaient régulièrement la région du Cap, je comptais plus d’un de mes anciens condisciples de Saint-Pol. Catherine Dénès les priait de s’enquérir si j’avais toujours sujet d’être content de mon sort ; moi, en retour, je les chargeais de lui porter mes vœux de longue santé. Mais c’étaient à peu près toutes nos relations. La violence de ma passion pour Adèle avait absorbé, anéanti toutes mes autres facultés d’amour.

Aux heures de crise seulement, lorsque je sentais ma femme m’échapper et me devenir cruellement étrangère, presque hostile, dans la détresse infinie dont j’étais plein, la pâle et mélancolique figure de ma mère reprenait vie et couleur sur un lointain d’autant plus lumineux que le présent m’apparaissait plus sombre. J’élevais vers elle mon âme endolorie.