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LXXVIII

L’auberge du Paradis


Il y a quatre-vingt-dix-neuf auberges de la terre au paradis. Il faut faire une station dans chacune. Quand on n’a pas d’argent pour payer, on rebrousse chemin vers l’Enfer.

L’auberge de mi-route[1] s’appelle Bitêklè.

Le bon Dieu y vient faire sa tournée une fois par semaine, le samedi soir.

Il emmène avec lui en paradis les clients qui ne sont pas trop soûls.

Il ne manque pas d’ivrognes incorrigibles qui séjournent à Bitèklê plus que de raison.

De ce nombre sont, dit-on, Laur Kerrichard et Job Ann Toër (Joseph le couvreur), tous deux de Penvénan.

Depuis cinq ans qu’ils sont « partis », ils n’ont pas dépassé Bitêklè. C’étaient de leur vivant deux francs compagnons, les meilleurs enfants du monde, mais

  1. Sur presque tous les trajets d’un bourg breton à l’autre, il y a une auberge dite « de mi-route » (ann anter-hent). Les chevaux des voituriers indigènes s’y arrêtent d’eux-mêmes.