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mins ; si l’on mangeait de la nourriture des morts, on ne pourrait plus jamais revenir parmi les vivants. Cette croyance s’exprime très clairement dans l’histoire du charbonnier qui, pris par le mauvais temps, s’est vu obligé de se réfugier, dans une maison perdue en un coin d’une lande déserte. Il y trouve trois vieilles femmes, l’une qui compte de l’argent, l’autre qui fait des crêpes, la troisième qui avale un os qui lui sort par la nuque et qu’elle ravale aussitôt ; il refuse tout ce qu’elles lui offrent et il est sauvé. S’il avait accepté crêpes, argent ou viande, il aurait pris leur place et n’aurait jamais revu sa maison[1]. Mais il est sage de ne pas s’exposer sans nécessité à de tels périls, et si l’on est contraint de sortir le soir, la prudence commande de se faire accompagner de deux autres personnes, baptisées comme vous-même, le revenant le plus désireux de nuire ne peut rien contre trois baptêmes.

Ce ne sont pas au reste seulement les âmes en peine que la nuit on peut rencontrer par les chemins, c’est aussi la Mort même, l’Ankou. Il n’est guère de Bretons qui n’ait entendu l’essieu grinçant de sa charrette. Mais malheur à celui qui vient croi-

  1. Voir, sur cette question, S. Hartland, The science of fairy tales, p. 40-48.