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LXVII

Les trois femmes


J’ai entendu raconter ceci à un charbonnier de l’Argoat. Pendant la belle saison, il allait de bourg en bourg, comme tous ses pareils, vendant son charbon à qui voulait en acheter.

Il s’arrêtait chez nous, régulièrement ; on lui donnait le souper et le gîte. En retour, il nous faisait le récit de ses aventures.

Il lui arrivait souvent d’être surpris par la nuit en pleine campagne, loin de tout village et de toute habitation. Il était rare qu’en pareil cas il ne lui advînt pas quelque chose d’extraordinaire.

La nuit dont je vous parle, il se trouvait dans la grande lande de Pontmelvez. Un vrai désert. Deux lieues de plateau sans un seul arbre. Pas un talus où s’abriter contre le vent. Et justement, cette nuit-là, il soufflait un vent de tous les diables, un vent de montagne, âpre et tenace, qui vous pinçait la peau jusqu’au sang. Le ciel, noir comme un four. Pas une étoile. Pour surcroît de malheur, une rafale avait éteint la lanterne du charbonnier. Il menait son cheval par la bride, à l’aveuglette. Dans un chemin or-