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elle se rendit pieds-nus auprès du lit de sa mère qu’elle éveilla doucement, afin de lui demander conseil.

Les mères sont toujours trop heureuses de bien caser leurs filles. La mère de Dunvel déplorait la fierté de son mari qui, plus encore que la fortune des Pennek, était le grand obstacle au bonheur de son enfant. Elle dit à sa fille :

— Si René Pennek t’est venu chercher au milieu de nuit, c’est qu’il a fini par arracher leur consentement à ses « vieux » et qu’il tient à battre le fer pendant qu’il est chaud. Suis-le, puisqu’il te fait signe. Il n’est pire sottise que de tourner le dos à son étoile.

— Mais votre présence n’est-elle pas indispensable, ainsi que celle de mon père ?

— Ne te mets en peine de rien. Je vais préparer Juluenn Karis à cet événement qu’il souhaite autant que moi de voir arriver, quoiqu’il s’en taise. Toi, prends les devants, avec ton promis.

Dunvel ne se le fit pas répéter deux fois. Les paroles de sa mère l’avaient rassurée contre ses mauvaises imaginations. Elle passa prestement sa jupe et son corsage, épingla sa coiffe, saisit ses sabots d’une main et tira le verrou de l’autre.

— Enfin ! tu t’es donc décidée ! cria, sur le seuil, la voix de René Pennek.

La mère de Dunvel attendit que le galop du cheval qui emportait sa fille et le fiancé de sa fille se fût perdu dans l’éloignement. Puis elle poussa du coude Juluenn Karis qui dormait à côté d’elle du lourd sommeil de ceux qui, le jour durant, ont durement travaillé aux champs.