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sur l’autre versant du Ménez-Bré[1]. Il appartenait à Ervoann Pennek, du chef de sa femme qui était de par là. René, pour y arriver, avait à parcourir quatre bonnes lieues. Et, à l’époque dont je vous parle, les routes ne ressemblaient guère à celles d’aujourd’hui. Jusqu’au Menez, le chemin n’était que fondrières. Il fallait compter ensuite l’escalade du Mont par des sentiers ravinés comme des lits de torrents, puis la descente du versant opposé, plus dangereuse encore que l’escalade.

— C’est toute une journée à passer dehors, s’était dit René Pennek en s’asseyant en selle.

Il entendait par là que c’était toute une journée sans voir sa « douce ».

Pour se mettre le cœur en repos, il fit un crochet et traversa la cour des Karis. Dunvel était en train d’étendre la lessive sur l’herbe du clos. René Pennek la serra dans ses bras et reprit sa route, en sifflant une chanson joyeuse. Quant à Dunvel, il paraît qu’elle fut triste tout le restant du jour, sans qu’elle sût elle-même pourquoi.

  1. V. dans le chapitre « Après la mort » la note sur le Ménez-Bré, à propos de la « Messe de Trentaine ».

    Pédernec, où ma conteuse plaçait cette légende et Louargat sont deux communes situées de part et d’autre de la montagne, l’une au sud, l’autre au nord. Disons en passant que ce terroir du Ménez-Bré est l’un des plus féconds que je connaisse en légendes et en chansons. M. Luzel et moi nous avons fait dans cette région de très fructueux séjours. C’est là également que M. Bourgault-Ducoudray a noté les airs les plus originaux de ses Mélodies populaires de la Basse-Bretagne.