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marraine. Pourquoi donc vos vêtements étaient-ils trempés à ce point, quand vous êtes venue ici tout d’abord ?

— Je puis te le dire à présent, ma filleule, répondit la pauvresse. Depuis cinquante ans je fais pénitence au fond de la citerne qui est dans la cour.

— En ce cas, je vous ai peut-être blessée avant-hier, quand j’y ai jeté des pierres pour amuser l’enfant ?

— Tu m’as sauvée au contraire. Je ne pouvais sortir de ce trou qu’à la condition d’avoir une pierre dans la main, une pierre de secours jetée par un vivant.

Ce disant, la vieille fouilla dans la poche de sa jupe.

— Cette pierre, la voici, dit-elle. Je te la rends afin qu’elle te porte bonheur.

— Mais alors, reprit la jeune fille, ce n’est donc pas vous qui avez rejeté contre la maison tous les cailloux que j’avais lancés dans la citerne ?

— Certes, non ! Celui qui faisait cela, c’était mon mauvais ange. Heureusement, il n’a pas pu les rejeter tous. Je tenais déjà bien serrée dans ma main la pierre qui devait me sauver. C’est celle que je t’ai remise. Garde-la précieusement. Je ne saurais te faire un meilleur cadeau, en reconnaissance du service que tu m’as rendu. Mais si tu t’en sépares, le bonheur sortira de ta maison avec elle.

— Je vous remercie, dit la jeune servante. Je veillerai sur cette pierre de salut comme sur la prunelle de mes yeux. Si vous allez maintenant en paradis, faites savoir à ma mère que vous m’aurez vue.