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Ils ne sont point morts, mais ils ne reviennent pas dans leurs maisons, près de leurs enfants et de leurs femmes ; c’est vers un lointain pays qu’ils vont, vers le séjour des morts sans doute, le paradis de Dieu. Malgré les raisons qui tendent à faire considérer les villes englouties comme des villes enchantées, j’inclinerais, pour ma part, à croire qu’elles sont bien plutôt encore pour l’imagination bretonne des villes mortes, au sens propre du mot, des villes de morts ; la mer est toute peuplée d’âmes errantes, les âmes des noyés qui n’ont pu recevoir de sépulture ; peut-être est-ce une raison pour que l’on ait songé à placer sous les eaux quelques-uns des multiples séjours des morts.

Ce que ne sont point, à coup sûr, les habitants d’Ys, ce sont des génies de la mer, des sirènes, des fées ou des morgans. Ce sont des hommes, à n’en point douter, des morts ou des demi-vivants. Les deux conceptions de la ville morte et de la ville enchantée se sont entremêlées de telle sorte qu’il est devenu difficile de les débrouiller l’une de l’autre. Cette confusion est d’autant plus aisée que ceux qui meurent de mort violente doivent, d’après une croyance généralement répandue en Basse-Bretagne, rester entre la vie et la mort jusqu’à ce que se soit écoulé le temps qu’ils avaient à