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il est question d’une sorcière dont l’âme avait pris la forme d’une grosse mouche[1].

Le corps garde dans la tombe une sorte de vie qui persiste jusque dans les ossements, tandis que l’âme souffre en purgatoire ou parmi les landes. Lorsqu’on a l’imprudence de pénétrer la nuit dans un charnier, ce ne sont pas les âmes qui viennent vous frapper d’un coup mortel, mais les ossements eux-mêmes qui se jettent sur vous et vous déchirent. L’homme vit ainsi après sa mort d’une double existence. Or c’est là une croyance presque universelle chez les peuples non civilisés et dont il semble superflu de donner ici des exemples particuliers ; c’est cette croyance qui donne le sens des cérémonies accomplies sur les tombes ; c’est elle qui explique que l’on dépose aux lieux où sont enterrés les morts des aliments et des boissons. Mais la conception la plus répandue, c’est que le corps est bien mort, lorsqu’il ne reste plus de lui qu’un squelette, et que seul continue alors à vivre son double, l’âme qui servait naguère à le mouvoir. On a vu que les Bretons au contraire animent jusqu’aux ossements même, et c’est

  1. E. Gérard, The Land beyond the forest, t. I, p. 27 et seq. On trouverait, de tous ces faits, d’autres exemples dans le livre de Bastiun : Die Seele und ihre Erscheinungwesen in der Ethnographie.