Nous continuâmes tout de même de cheminer. Mais à chaque instant, j’étais obligée d’attendre que Marie m’eût rejointe. Elle détournait la tête sans cesse, d’un air inquiet.
— Que regardez-vous ainsi ? lui demandai-je.
Je n’étais pas très rassurée moi-même. Il me semblait entendre derrière nous un petit pas menu, comme un pas d’enfant. Nous étions cependant toutes seules sur la route.
— Est-ce que vous n’entendez pas ? fit Marie Sigorel, en réponse à ma question.
— Si, dis-je. Qu’est-ce que cela peut bien signifier ?
— Je ne sais. Nous ferions peut-être mieux de nous arrêter. D’ailleurs, je n’en puis plus. Il faut que je délace mon corsage. Il me semble le sentir aussi lourd que plomb sur mes épaules[1].
Nous nous assîmes sur un tas de pierres. Je méditais tristement. Tout à coup une inspiration me vint :
— Marie Sigorel, avez-vous été prier sur la tombe du mort, avant de vous mettre en route.
— En vérité, non. Je n’en ai pas eu l’idée.
— Oh ! bien, alors tout s’explique. Si vous étiez allée au cimetière inviter l’enfant à marcher devant vous, nous ne l’aurions pas eu sur nos talons, et vous n’auriez pas eu le poids de son vœu sur les épaules.
— J’ai eu grand tort. Mais maintenant, comment faire ?
- ↑ Cf. Luzel, Contes pop. de la Basse-Bretagne, t. III, p. 203 : La princesse enchantée, et P. Sébillot : Traditions et superstitions de la Haute-Bretagne, I, 231. — [L. M.]