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EN BASSE-BRETAGNE

Il arrive parfois que le mauvais temps empêche la grande procession de la Troménie de sortir. Mais en ce cas des cloches mystérieuses se mettent à sonner dans le ciel, et l’on voit un long cortège d’ombres se profiler sur les nuages. Ce sont des âmes défuntes qui accomplissent quand même la cérémonie sacrée. Saint Ronan les guide en personne et marche à leur tête, en agitant sa clochette de fer[1].

Le second pèlerinage obligatoire est celui de Saint-Servais (en breton Sant Gelvestr-ar-Pihan).

Si on ne fait pas, de son vivant, ce pèlerinage, on est condamné à l’accomplir après la mort. On emporte en ce cas son cercueil sur les épaules, et on n’avance, chaque jour, que de la longueur de ce cercueil.

Dans le mur de l’église de Saint-Servais s’ouvre une cavité profonde. C’est par là que, leurs dévotions terminées, les défunts rentrent sous terre. Il suffit de passer la tête dans l’orifice du trou pour entendre le

  1. Une vision de ce genre a été consignée dans un des registres de la paroisse de Locronan. « … Et ont les dits susnommés unanimement déclarés avoir ouï dire par leurs prédécesseurs (il s’agit sans doute de fabriciens) que l’on avait vu sortir les dictes relicques avec croix et bannières, les cloches sonnantes d’elles-mesmes, et aller faire la dicte procession à pareil jour du dict tour… » J’emprunte cette citation à l’opuscule de M. l’abbé Thomas, qui ne la donne lui-même que sous une forme tronquée. Quant aux dictons que je relate ci-dessus, ils m’ont été fournis principalement par une vieille marchande de fruits, de Quimper, que je n’ai jamais entendu désigner que par son prénom de Naïc. Ils ont du reste cours dans toute la Basse-Cornouaille.