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Je vous promets que le fils aîné du Guern ne riait plus, et que la colère lui avait passé, comme s’abat un coup de vent, quand la pluie crève.

Sa mère, qui se tenait derrière lui, le prit par la manche de sa veste.

— Jozon, murmura-t-elle, tu t’es comporté comme un fripon. Tu vas, s’il te plaît, te rendre de ce pas au presbytère. Il n’y a que le vieux recteur qui puisse arranger tout ceci.

Le jeune homme ne se le fit pas dire deux fois. Il n’était que trop pressé de sortir de ce mauvais cas.

Une demi-heure après, il amenait le recteur. Le digne prêtre esquissa quelques signes de croix, marmonna quelques paroles latines, puis, prenant la tête de mort, il la mit entre les mains du jeune homme.

— Tu vas, commanda-t-il, la rapporter au charnier de Pommerit, d’où elle est venue. Tu l’y déposeras au coup de minuit. Seulement tu auras soin de te faire accompagner d’un enfant non baptisé encore. Gaud Keraudrenn, du hameau voisin, est précisément accouchée la nuit dernière. Rends-toi d’abord chez elle, et prie-la de ma part qu’elle te confie son nouveau-né. Dieu te donne la grâce de réparer ta faute !

Le soir du même jour, Jozon du Guern repartait pour Pommerit, une tête de mort dans une main, un nouveau-né sur l’autre bras.

Par exemple, il ne fredonnait plus :

— Petite coiffe de toile fine…

Comme on dit, il n’en menait pas large. Il marchait vite, néanmoins, et, à minuit sonnant, il réintégrait la tête de mort dans le charnier d’où elle était venue.