XXXVIII
La coiffe de la morte
Je ne saurais vous dire au juste combien il y a de temps de ceci. Toujours est-il que Louis, fils de mon oncle Jean, s’était engagé à fournir quelques mille de paille à un hôtelier de Pontrieux. Cette paille, il l’avait lui-même achetée au manoir du Guern, en Servel. Il s’entendit avec les jeunes gens du manoir pour faire le charroi, qui se composa de quatre charrettes. La route est longue de Servel à Pontrieux. Mais les auberges sont nombreuses ; partant, les étapes sont courtes. Nos convoyeurs de paille ne manquèrent pas de chopiner gaiement. Tous jeunes, ils avaient bonne tête et le gosier large. À Pontrieux, livraison faite, on acheva la noce ; et si, au retour, les charrettes étaient vides, les conducteurs, en revanche, étaient quelque peu pleins
Tant que dura le jour, ils dirent des folies et chantèrent des chansons. La nuit venant, ils se turent, cheminant silencieux à côté de leurs bêtes. Mais vous savez qu’il n’est pire ivresse que celle qui couve en dedans.
Comme nos gens traversaient le bourg de Pommerit, passé la onzième heure, mon cousin Louis s’écria :
— Damné serai-je ! Les filles de Pommerit avaient