Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/244

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Voici l’écu de six livres, Mônik. Il est à vous ; vous l’avez bien gagné.

— Je vous remercie, mon maître, répondit l’enfant. Et elle se rendit à l’église avec la pièce blanche. Le recteur était à son confessionnal : elle l’y alla trouver, lui conta ce qu’elle avait fait, et, lui remettant l’argent, le pria de dire une messe à l’intention de l’âme du purgatoire qui en avait le plus besoin.

— Peut-être est-ce l’un de mes parents inconnus qui en bénéficiera, ajouta-t-elle. C’est pour cela que j’ai toujours rêvé, depuis que je suis en âge de raison, d’avoir à moi quelques sous. Les âmes défuntes le savaient. Aussi m’ont-elles protégée cette nuit.

— Eh bien, dit le recteur, en lui donnant l’absolution, vous allez être tout de suite satisfaite. La messe que je vais dire sera vôtre.

Mônik y assista pieusement et prit part à la communion.

La messe finie, comme elle s’apprêtait à sortir, l’âme légère, pour gagner Guernoter, elle se croisa sous le porche avec un homme à cheveux blancs ; il semblait vieux comme la terre, et cependant il avait le corps droit, la démarche aisée.

Il aborda la fillette, avec une profonde révérence.

— Jeune demoiselle, porteriez-vous ce billet à Kersaliou ?

— Oui bien, homme vénérable, répondit-elle en prenant le billet qu’il lui tendait.

Le vieillard eut un sourire si bon, un remercîment si tendre, que Mônik croyait encore voir le sourire, entendre le remercîment, tandis qu’elle s’acheminait