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poussé un long et triste soupir[1], il me tourna brusquement le dos. Tout disparut.

Les battants de la fenêtre se refermèrent avec violence.

Quelques minutes encore, par les routes pierreuses, au loin, sous la lune, retentit le wig-a-wag du chariot funèbre.

Il n’y avait pas de doute possible : l’Ankou emmenait Marco.

Je n’osais plus rester seul dans la chambre. Je me réfugiai à la cuisine. J’y trouvai Catel assise dans l’âtre, et somnolant à demi, près de la chandelle de résine qui éclairait à peine.

— Comment va Marco ? lui demandai-je. Elle se frotta les yeux et murmura :

— Je suis restée le veiller. Je crois qu’il repose. Il n’a eu besoin de rien.

— Voyons ! dis-je.

Nous penchâmes nos têtes à l’intérieur du lit clos. Effectivement, Marco Hamon n’avait eu besoin de rien : il était mort !… Je lui fermai les yeux, non sans y avoir lu le même regard désespéré qu’il m’avait lancé tout à l’heure, en passant dans la chambre.

Je suis sûr que Marco Hamon, avant de s’en aller, avait demandé à venir me trouver dans mon lit, « parce qu’il avait quelque chose à me dire. » J’eus le tort de

  1. Le breton dit, d’un mot expressif : eun huannadenn. Il faudrait presque traduire : un ahannement.