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XI

L’intersigne des « rames »


Un soir, après souper, nous étions, comme cela, à causer au coin du feu. On était en plein hiver, et vous savez si, en cette saison, le vent souffle sur nos côtes. Je n’avais que dix ans à l’époque, j’en ai aujourd’hui soixante-trois, mais de semblables souvenirs ne sortent de la mémoire que lorsque la vie s’en va du corps. D’entendre meugler la tempête, on en vint tout naturellement à parler de mon frère aîné, Guillaume, qui était alors marin sur la mer. Ma mère fit observer que depuis longtemps on n’avait eu de ses nouvelles. Sa dernière lettre était datée de Valparaiso. Dans cette lettre, il se disait en parfaite santé, mais elle remontait déjà à six mois. Il est vrai que les matelots ne sont pas prodigues d’écritures.

— Tout de même, disait ma mère, je voudrais bien savoir où il est à cette heure. Pourvu qu’il n’ait pas à pâtir du coup de vent qu’il fait ce soir !

Là-dessus on commença les prières auxquelles on ajouta un Pater tout exprès à l’intention de mon frère Guillaume. Puis, nous nous en fûmes coucher.

Moi je partageais le lit de ma sœur Coupaïa.

Nous dormions déjà à moitié, lorsque la voix de