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hymne funéraire latine commençant, je suppose, par Pro illa anima,,.)

On procède de la manière suivante :

Dès que le syndic des gens de mer, en résidence à l'île, a été prévenu administrativement de la disparition d'un « îlien », il mande, non la mère, ou la veuve, ou la fille du mort, mais l'homme le plus ancien de la parenté, et il lui fait part du décès probable du « disparu ». L* « ancien » se met aussitôt en route à travers l'île, entre chez tous les proches de la famille, dont le nombre dépasse quelquefois soixante et même quatre-vingts, et leur annonce la triste nouvelle, en se servant de cette formule invariable :

— Vous êtes avertis qu'il y aura, ce soir, proella chez un tel.

Et ce n'est qu'à la tombée de la nuit qu'il se rend à la maison du mort. Il entre dans la cour à pas de loup, va regarder par la fenêtre si la femme, qui ne sait pas encore qu'elle est veuve, est chez elle, et, s'il l'aperçoit dans la cuisine, frappe trois petits coups à la vitre Après cette sorte de préambule et dé préparation, il passe la porte, en se contentant de prononcer la phrase sacramentelle :

— Il y a proella chez toi, ce soir, ma pauvre enfant. Les femmes du voisinage, accourues derrière lui, se précipitent alors dans la maison et, par leurs gémissements et leurs cris, font bruyamment chorus avec la douleur de la famille. C'est ce qu'on appelle « mener le deuil ». Plus les plaintes sont aiguës et déchirantes, plus elles réjouissent l'âme du mort. Tout en se livrant à ces démonstrations, on vaque aux apprêts