Page:Le Braz - La légende de la mort chez les Bretons vol 2 1902.djvu/364

Cette page n’a pas encore été corrigée



entre Satan et lui, il n'a certes pas été assez sot pour faire la part si belle à son mortel ennemi.

Vous voyez que Jean l'Or jugeait Dieu à son aune.

Il concluait :

— Allons en tout cas faire un tour de ce côté. Je verrai du moins de quoi il retourne. Sll y a danger, il sera toujours temps de rebrousser chemin.

Et le voilà de faire lieue sur lieue, tant et si bien qu'il arriva à la ligne qui sépare le domaine de Dieu de celui du diable.

Il s'agenouilla, en deçà de la ligne, et se mit à gratter la terre.

Mais il ne réussit qu*à s'ensanglanter les ongles contre une pierre aussi dure et d'aussi peu de valeur que celle qui faisait le fond de son champ, en Basse-Bretagne.

— Ma foi, maugréa-t-il, il ne sera pas dit que j'aurai tant cheminé pour rien. Il faut que je sache si vraiment le diable est plus riche que le bon Dieu. Je regarderai et je ne toucherai pas.

Il franchit la ligne, s'agenouilla encore, et recommença à gratter. Ici, la terre était molle comme du sable. A peine y eut-il plongé les mains qu'il en retira un caillou de la grosseur d'un œuf, un caillou en or pur, en bel or blond tout flambant neuf.

Puis, ce fut un second caillou, de la grosseur d'un galet de cordonnier '.

Puis, un troisième, aussi large qu'une meule [de moulin.

1. Nos cordonniers se servent d'un galet aplati, qu'ils disposent sur leurs genoux, pour battre leur cuir et le rendre plus souple.