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Devant la porte de la cour était resté — le corps du pauvre homme décédé ; — seuls les deux chiens veillaient à ses côtés. — C'était là une grande leçon !

Lorsque la femme eut connaissance de la chose, — elle se prit à pleurer, à se lamenter. — <c Hélas I c*est moi qui suis cause, dit-elle, — de ce malheur, de cet ennui I

« Le grand chien, c'est moi qui Tai lâché !... — Et c'est lui qui l'aura étranglé !... — Et cela, parce qu'il demandait — un morceau de pain, au nom de Dieu !... »

Il vint du monde voir le mort, — s'informer de ce qui lui était arrivé. — Il ne portait pas trace de blessure. — Peu après, il fut enseveli.

La femme, dans l'espoir d'expier — sa faute, sans regret, ni tristesse — donna pour Tenlinceuler — chemise, drap, à mettre avec lui dans la tombe.

A la nouvelle d'un malheur si grand, — il se fit nombreux concours de gens — pour le voir déposer en terre ; — et tous avaient navrement et ennui.

A Guinevez il fut envoyé — enterrer, avec tous les honneurs possibles. — Ce fut la femme qui paya les prêtres — pour célébrer le service et dire les prières d'usage.

Quand elle fut de retour chez elle, — elle trouva sur la table — et son argent et son linge. —> A confesse elle se rendit aussitôt.

Mais elle ne trouva aucun prêtre pour l'absoudre. — Il fallait qu'elle partît pour Rome, — qu'elle s'adressât au pape et lui confessât — ses péchés, sans en rien taire.

Cette pénitence, elle Taccepta. — Aux siens elle demanda, — le soir même, la permission de se mettre en route : — « Mon mari, je ne puis différer !... »

Son mari lui parla de la sorte : — « Où vous allez, je vous suivrai. — Si l'un de nous part, nous partirons tous deux. — Je n'ai cure des biens (que je laisserai derrière moi) ! »

Elle avait un fils encore à la mamelle ; — c'est lui qu'elle em* brassa le premier, — puis vint le tour de sa fille aînée. — « Adieu I dit-elle, mes enfants ! »

Les voilà tous deux de partir, — emportant avec eux un double