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REVENANTS DANS LE ROMAN d' AVENTURE 231

darmes Tempoignèrent par sa veste et le précipitèrent dans le brasier. Il y flamba comme une simple allumette.

Les invités ne perdirent rien à cela. Au lieu d'une noce, ce fut un retour de noce. Au lieu d'un repas, il y en eut vingt. Huit jours durant, les broches tournèrent, les tonneaux coulèrent, les gens mangèrent, burent, se vidèrent et recommencèrent. Il n'y eut personne de mécontent de voir le maître remis en possession de sa femme et de ses biens, si ce n'est peut-être le Juif, mais celui-là n'est jamais venu se plaindre. Du feu de Kerdéval il a dû passer au feu de Fenfer oîi il continue de cuire, espérons-le, pour l'éternité.

La princesse, on s'en souvient, avait juré de ne retourner en Angleterre que lorsque la mort l'aurait réunie à Jean Carré. Jean Carré pensa que la condition exigée avait peut-être été remplie, puisqu'en somme c'était grâce à un mort qu'il avait pu rejoindre sa femme. La marraine fut de son avis. Ils s'embar-, quèrent donc tous pour Londres. Mais le roi et la reine de ce pays ayant trépassé peu après, Jean Carré, sa femme et sa marraine, regagnèrent leur château de Basse-Bretagne où désormais ils vécurent heureux. Puissiez-vous avoir bonheur égal, à moins de frais M (Conté par Lise Bellec, couturière. — Port-Blanc.)

1. Quiconque est au courant de la vieille littérature romanesque

française aura reconnu dans cette légende, dès les premières pages,

une variante bretonne du célèbre « Jean de Calais ». Mais que de

différences entre l'original français et l'adaptation bretonne I Et je

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