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rr Soëz Chatton, allume-moi une chandelle que j'aille voir ce qu'il faut au vieux stoupêr ( marchand d'étoupes) !

— Jamais de la vie, Charlo ! Tu ne feras pas cette chose. Il nous arriverait malheur.

Je suis entêté, quand les verres pleins m'ont passé ailleurs que sous le nez.

J'allumai moi-même la chandelle, et me voilà dans l'escalier... Je n'avais pas grimpé six marches que je restai comme cloué sur place. Il venait de là-haut un vent terrible, un vent glacé qui faillit me jeter bas.

Du coup, toute ma boisson s'évapora et, avec elle, mon courage.

Je redescendis.

— Cela te servira de leçoui me dit ma femme. Vous me croirez si vous voulez, mais une année

durant, nous nous résignâmes à entendre au-dessus de nous le bruit du rouet, et, au bout d'une année, notre patience n avait pas lassé le mort. Du reste, nous nous étions faits à notre supplice. Le ron-ron ne nous troublait presque plus. Si même il tardait parfois à se faire entendre, nous en étions comme inquiets. Il nous manquait quelque chose. Je disais souvent à Soëz :

— Pourvu que le vieux stoupêr ne réveille pas les enfants, c'est tout ce qu'il faut.

Mais, en une année, les enfants grandissent. Certain soir, un des nôtres se dressa en sursaut dans son lit :

— Mère, qui est-ce donc qui file ?