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n'avança plus qu*à tâtons, parée qu'il avait sur lui, outre Tombre des talus, celle des très vieux arbres dont ils étaient plantés. Il allait donc avec précaution, assujettissant chacun de ses pas. Or, dans le silence qui était profond, et quoique l'air demeurât immobile, comme il arrive généralement par les chaudes soirées d'août, voici qu'il entendit, au-dessus de sa tête, le feuillage commencer à bruire d'une manière bizarre et tout inattendue.

— Tiens ! c'est, ma foi, une chose assez particulière, pensa-t-il.

Il leva les yeux et, malgré l'obscurité, reconnut, à la blancheur argentée de l'écorce, que les arbres dont les ramures bruissaient de la sorte étaient deux hêtres d'aspect vénérable qui se faisaient vis-à-vis d'un talus à l'autre et mêlaient leurs branches comme pour s'embrasser*. Ce qu'il y avait de plus étrange, c'est que leur murmure, très léger, ressemblait à un chu» chotement de voix humaines. Hervé Hamon suspendit son pas et prêta l'oreille. Plus de doute, les deux hêtres causaient entre eux. Notre homme, pour les écouter, oublia moulin, farine et crêpes.

Le premier des deux arbres, celui de droite, disait :

•^ Je crois que tu as froid, Maharit. Tu trembles de tous tes membres.

1. ces deux hêtres on peut comparer dans la légende irlandaise les deux ifs qui, issus de deux pieux enfoncés dans les corps deNoisé et de Derdriu(cf. 1. 1, p. 259) entrelacèrent leurs branches au-dessus de la tombe {Transactions of the Gaelic Society, 1808, p. 133, cités par H. Gaidoz, MHusine, t. IV, col. 12).