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Quelques parcelles de leur pensée resteront du moins mêlées à ce livre qui est un peu comme leur testament.

Si j’ai fait en sorte d’étendre mes investigations à toutes les contrées bretonnes dont les parlers m’étaient accessibles, il y a cependant des cantons où j’ai plus particulièrement séjourné et qui m’ont fourni la contribution la plus importante. Car il en est de la mémoire de nos paysans comme des bahuts qui ornent leurs fermes : elle est comble de choses, mais lente à s’ouvrir. Ce n’est que par une série de pesées régulières, en quelque sorte, que l’on arrive à forcer ses secrets et à lui arracher bribe à bribe ce qu’elle contient. Ce travail de patience veut des jours et des mois. Un des points de la Bretagne où j’ai pu le pratiquer avec le plus de fruit est le Port-Blanc, comme on aura l’occasion d’en juger par la fréquence avec laquelle ce nom revient aux pages de ces deux volumes. Pour donner une idée de la méthode que j’ai suivie, je ne saurais mieux faire, je crois, que de montrer comment je procédai dans ce milieu restreint.

Le Port-Blanc est un petit hameau marin dépendant de la commune de Penvénan, à quelque dix kilomètres de Tréguier, sur la Manche. Comme la station gauloise dont parle Procope, il est habité par une population de pêcheurs qui vivent autant de la culture de leurs champs que du produit de leurs barques. Ils en vivent, du reste, assez mal,