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trait par où elle rappelle le fabuleux pays des sidhe.

Avant le châtiment qui la frappe — et qui est une fiction chrétienne — elle apparaît, elle aussi, comme la contrée de la joie. Tous les jours, toutes les nuits, ce ne sont que liesses, ripailles et voluptés. Comme Tethra, le roi de Mag-Mell, Grallon, le roi de Ker-Is, prêche d’exemple à ses sujets. Et, dans Ahès ou Dahut, sa fille, qui ne reconnaîtrait la sœur bretonne de Fand, à sa flottante chevelure d’or, à sa beauté sans pareille, aux prestiges de sa jeunesse, au charme irrésistible de sa voix  ? Ainsi que Fand, Dahut recherche les fils des hommes  ; ainsi que Fand, elle est experte aux maléfices d’amour, et les cœurs sont aussi dociles à son appel qu’à l’appel de Fand les cœurs d’un Cûchulainn ou d’un Condlé. Joignez que le même incertitude plane sur la ville sous-marine que sur la terre « des vivants ». Est-elle un séjour élyséen ou simplement une cité de féerie ? On ne saurait le dire au juste. Non pas que des gens de ce monde ne l’aient visitée ; il en est d’elle, sur ce point encore, comme de Mag-Mell, et il n’est pas nécessaire d’être sorti de cette vie pour y avoir accès. D’aucuns ont donc franchi ses portes et causé avec ses habitants. Mais leurs témoignages ne nous apprennent rien de précis sur les êtres qu’ils ont rencontrés : on se demande s’il s’agit de morts véritables ou si ce ne seraient pas plutôt des