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familles d’ouvriers, d’hommes d’équipe, transplantées de Bretagne dans les quartiers de Grenelle ou de Vaugirard, qui, lorsqu’elles étaient de quelque loisir, s’en allaient, sous prétexte de prendre l’air, rôder par les avenues du cimetière Montparnasse. « Ça nous rappelle un peu chez nous », disaient-elles. A parcourir ces asiles funèbres, elles s’imaginaient retrouver leur pays.


V


Au fond, toute la conscience de ce peuple est orientée vers les choses de la mort. Et les idées qu’il s’en fait, malgré la forte empreinte chrétienne qu’elles ont reçue, ne semblent guère différentes de celles que nous avons signalées chez ses ancêtres païens. Pour lui, comme pour les Celtes primitifs, la mort est moins un changement de condition qu’un voyage, un départ pour un autre monde. Et sans doute, à propos de cet autre monde, il prononce bien les mots de paradis, d’enfer, de purgatoire  ; mais il est visible qu’il ne s’en sert que comme d’une langue apprise et que ce qu’il aperçoit derrière ces vocables n’a qu’un rapport très lointain avec les notions particulières qu’ils expriment.

Pas plus que les Gaulois du temps de Lucain ou les Gaëls de la vieille Irlande, les Bretons ne relèguent