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messe soit dite par le recteur de Penvénan, par luimême, entends-tu ?

— J'entends.

— Merci, Poaz-coz! prononça le spectre. Ce fut sa dernière parole. Le fossoyeur le vit sortir, traverser la place du bourg1, et franchir l'échalierdu cimetière.

Le surlendemain, qui était un dimanche, au prône de la grand'messe, le recteur annonça pour le mardi de la semaine à venir un service « recommandé par Poëzevara, le fossoyeur, pour l'âme de François Roperz, de Kerviniou »'.

Ce mardi arriva. La messe fut dite. Le recteur officiait en personne, et au premier rang des assistants était agenouillé Poaz-coz. J'y étais aussi, moi qui vous parle. Ma chaise touchait celle du fossoyeur.

Au moment où l'office terminé, le recteur s'acheminait vers la sacristie, Poaz me poussa le coude.

— Regarde donc! dit-il, d'une voix qui tremblait.

— Quoi?

— Ne vois-tu pas quelqu'un qui entre h la sacristie, derrière le recteur?

— Si fait.

— Tu ne le reconnais pas?

Et, comme je ne trouvais pas assez vite qui ce pouvait être, Poaz-coz me souffla dans l'oreille :

— Mais, c'est François Roperz, malheureux, c'est François Roperz 1

1. Le fossoyeur Poëzevara est mort en 1889. La légende est de très récente formation, elle a pour point de départ des faits exacts  ; le recteur n'est pas mort le jour où il a dit une messe pour l'àme du mort mutilé, mais il a eu une attaque ce jour-là.