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et des veilleuses, qui, eux aussi, tremblaient la fièvre froide, la fièvre de la peur.

L'horloge de la maison tinta lentement l'heure de minuit.

Et, quand le douzième coup eut sonné, les chandelles qui brûlaient auprès du lit du mort s'éteignirent comme d'elles-mêmes.

Il ne se trouva pas un dans l'assistance pour oser les rallumer ; en sorte que le cadavre demeura dans une obscurité profonde. On entendait par instants claquer les draps au vent de la porte ouverte, comme si c'eussent été les toiles d'une lessive étendue en plein air sur l'herbe des prés.

De minuit jusqu'à l'aube, les gens qui veillaient n'échangèrent pas une parole. Et plus une prière ne fut récitée. On se tenait rencognés les uns contre les autres, éclairés seulement par la braise du foyer et par la fumeuse lueur du lutic, de la chandelle de résine. On tâchait, avec les mains, de se boucher les oreilles et les yeux, et l'on attendait le jour avec impatience1.

(Conté par Jeanne-Marie Corre, couturière. — Penvénan, 1888.)

1. En Irlande, le caoine ou lamentation funèbre se compose d'une lamentation versifiée combinée à une énumération des vertus du défunt. Dans les comtés de Cork et de Kerry, il y avait des pleureurs professionnels. A Limerick, la parente la plus proche du défunt heurte le cercueil d'une pierre qu'elle tient à la main et entonne la lamentation (G. H. Kinahan, Noies on ïrith folklore, The Folklore record, t. IV, p. 100). Un exemple de caoine est donné