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— Tu me vois donc !

— Je vous vois, puisque je vous parle. Dites-moi, ne seriez-vous pas l'âme du défunt Pêr Nicol qui fut mon meilleur ami en ce monde ?

— Si, Yvon, je suis ton ami mort, je suis Pêr Nicol.

— "Viens donc avec moi en ma maison. Je t'y mettrai dans un coin où tu seras bien tranquille, et nous converserons ensemble de temps en temps, comme autrefois.

— Je ne peux, mon pauvre Yvon. Ici est la place que Dieu m'a fixée pour y faire ma pénitence, et je dois y demeurer pendant cinq cents ans. Il faut que le bon Dieu t'aime bien pour t'avoir permis de reconnaître mon âme sous cette forme de moucheron.

— Oh ! je ne t'ai pas perdu de vue un seul instant depuis l'heure où tu t'es séparé de ton corps. Si pourtant ! je me trompe : pendant quelques minutes tu as disparu, sans que j'aie pu me rendre compte en quel lieu tu pouvais être. Mais d'abord dis-moi, je te prie, pourquoi tu as commencé par tremper tes pattes dans la jarre de lait ?

— Ne devais-je pas me blanchir, avant de comparaître devant le grand Juge ?

— Et ensuite, quand tu t'es esquivé, après avoir voleté de çi de là tout au travers de la maison, qu'es-tu devenu ?

— Si tu m'as vu voleter de çi de là tout au travers de la maison, c'est qu'il fallait que je prisse congé de chacun des meubles. Lorsque ensuite je me suis esquivé, c'était encore pour aller, dans la cour et dans les étables, prendre congé des instruments qui m'avaient