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XXXVII La fenêtre ouverte

J'étais allée, un soir, veiller un de mes parents, de Trélévern, qui était à l'article de la mort. C'était un pêcheur, du nom de Jean Guilcher, qui avait été dans son beau temps un des plus robustes gars du pays. Même usé par la misère et par les années, il gardait encore une vigueur peu commune. On le vit bien à cette occasion. Pendant deux jours, il agonisa : son corps ne consentait pas à se séparer de son âme'.

A tout moment, on disait autour de son lit ;

— C'est pour cette fois !

Et l'on croyait entendre expirer son souffle. Mais, l'instant d'après, il rouvrait les yeux, regardait les gens qui le veillaient et faisait signe qu'on lui donnât à boire.

Quand j'arrivai, il était au plus bas. Pourtant il me reconnut. Je m'assis à son chevet et me mis à réciter, avec les autres personnes présentes, les prières des agonisants. Tout à coup je sentis qu'on me touchait le coude. C'était lui, le vieux Guilcher, qui voulait attirer mon attention. Je me penchai au-dessus de son visage :

— Vous avez quelque chose à me dire ? demandai-je. Il fit un grand effort et, d'une voix faible, faible,

me murmura dans l'oreille :

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